Enfermement illégal à la frontière franco-italienne : le Conseil d’État s’en lave les mains

L’AdN a participé aux observations au poste frontière et est co-signataire de ce texte.

Dans une décision du 23 avril 2021, le Conseil d’État refuse d’ordonner la fermeture des locaux de « mise à l’abri » des postes de la police aux frontières (PAF) de Menton (Alpes-Maritimes) et de Montgenèvre (Hautes-Alpes) où sont enfermées sans cadre légal et sans droits les personnes étrangères à qui l’entrée sur le territoire français est refusée.

Reconnaissant que des personnes sont enfermées dans des locaux « qui ne sont prévus dans aucun texte », et pour une dizaine d’heures, le juge des référés du Conseil d’État valide pourtant ces pratiques de privation de liberté dépourvues de tout fondement légal et dénoncées depuis plus de 5 ans par nos associations et les instances de protection des droits humains.

S’il admet le « grand inconfort » lié au maintien dans ces locaux, le juge se satisfait des quelques récents efforts que les autorités françaises prétendent avoir accomplis, en réaction à notre initiative contentieuse, tels que la fourniture d’une « saladette » en guise de repas (jusqu’alors les personnes devaient se contenter de madeleines…). Quant au respect des droits des personnes (notamment le droit d’être informé, d’être assisté d’un interprète, de demander l’asile, de contacter un médecin, un proche, un conseil ou encore un avocat), le juge se contente de rappeler aux autorités « l’obligation du respect des droits » et la « grande vigilance » à apporter à « des situations particulières » sans autre précision et sans prononcer aucune injonction. Vœux pieux qui resteront sans doute lettre morte, maintenant ces pratiques dans la plus totale opacité.

Pourtant, la situation n’est pas celle d’un « grand inconfort » mais bien d’un manque total de respect de la dignité : enfermement de plusieurs dizaines de personnes dans des locaux exigus parmi lesquelles des hommes, des femmes, des familles, des femmes enceintes, des enfants en bas âge, des mineurs isolés, des personnes malades, des demandeurs d’asile, etc., privation de liberté pendant plus de 10 heures sans aucun droit y compris celui de demander l’asile ou d’avoir accès à un médecin, impossibilité d’assurer la sécurité sanitaire de ces personnes, traumatisme d’un enfant hospitalisé en état de choc post-traumatique suite à cet enfermement, etc.

Cette décision témoigne une fois de plus de l’indifférence du Conseil d’État quand il s’agit de condamner les violations des droits des personnes exilées. Mais nos associations continueront la lutte pour mettre fin à ce scandale et garantir un État où les droits de toutes et de tous seront effectivement respectés.

Complément d’information

Depuis juin 2015, nos associations constatent et dénoncent des pratiques illégales d’enfermement de personnes exilées par l’administration française à la frontière franco-italienne. Chaque jour, à la suite de contrôles discriminatoires et de procédures expéditives de refus d’entrée, des dizaines de personnes sont enfermées dans des constructions modulaires attenantes aux postes de la PAF de Menton et de Montgenèvre, pendant plusieurs heures quand ce n’est pas toute la nuit voire plus et ce, dans des conditions indignes : constructions de quelques mètres carrés sans isolation, pas de couverture, pas de possibilité de s’allonger, pas ou peu de nourriture ni d’eau, conditions d’hygiène déplorables, promiscuité forte entre toutes les personnes (familles, adultes, enfants, hommes et femmes).

En 2017, le Conseil d’État avait refusé de sanctionner ces pratiques, estimant qu’elles pouvaient être justifiées tant que la durée de privation de liberté ne dépassait pas une durée dite « raisonnable » de moins de 4 heures.

Pourtant, le constat de nos associations demeure le même : la privation de liberté quotidienne de dizaines de personnes, pour des durées régulièrement supérieures à 4 heures et dans des conditions indignes.

En dehors de tout cadre légal, cette privation de liberté échappe donc au contrôle juridictionnel et se déroule toujours dans la plus totale opacité. Depuis fin 2019, plusieurs élus se sont vu refuser l’accès à ces locaux (alors qu’ils pouvaient y accéder jusqu’alors) au motif que ceux-ci ne seraient pas des locaux de privation de liberté mais, au contraire, de « mise à l’abri » pour la « sécurité » des personnes exilées.

En septembre et octobre 2020, des représentantes de l’Anafé et de Médecins du Monde se sont donc présentées aux locaux de la PAF de Menton et de Montgenèvre afin d’apporter assistance juridique et médicale aux personnes y étant « mises à l’abri ». Or, au motif même de la « mise à l’abri » de ces personnes, l’accès leur a été refusé.

L’Anafé, Médecins du Monde, l’ADDE, la Fasti, le Gisti, La Cimade, Le Paria, la LDH, le SAF, le SM, Alliance-DEDF, Roya citoyenne et Tous Migrants ont alors décidé de lancer une campagne contentieuse contre cette privation de liberté à la frontière franco-italienne.

Saisis de ces refus d’accès, les juges des tribunaux administratifs de Nice et de Marseille par décisions en date du 30 novembre 2020 et du 10 décembre 2020, ont prononcé la suspension de ces refus d’accès et ont enjoint les préfectures de référence à réexaminer les demandes d’accès des associations.

Sans retours des préfectures, des représentantes de l’Anafé et de Médecins du Monde se sont donc de nouveau présentées aux locaux de la PAF de Menton et de Montgenèvre en janvier 2021. De nouveaux refus d’accès leur ont été opposés.

Nos associations ont donc décidé de saisir de nouveau les tribunaux administratifs de Nice et de Marseille en demandant, cette fois-ci, par le biais de référés liberté, à ce qu’il soit mis fin à ces pratiques de privation de liberté illégales en ordonnant la fermeture des locaux en question. A titre subsidiaire, nos associations demandaient à ce que les juges se prononcent plus fermement sur la question de l’accès dans les locaux.

Par décisions en date du 4 et du 16 mars 2021, les tribunaux administratifs de Nice et de Marseille ont enjoint les préfectures des Alpes-Maritimes et des Hautes-Alpes à prendre contact avec nos associations afin de définir les modalités d’accès aux locaux de la PAF de Menton et de Montgenèvre, sans pour autant se prononcer sur la fermeture des locaux privatifs de liberté.

Suite à ces décisions, les préfectures des Alpes-Maritimes et des Hautes-Alpes ont respectivement pris contact avec nos associations par courriers en date du 12 mars et du 9 avril, afin de débuter une négociation définissant un droit d’accès pour l’Anafé et Médecins du Monde dont, jusqu’à présent, les modalités demeurent très restrictives pour les associations (une fois par semaine, pour quelques heures en matinée, heures déterminées par les autorités).

Par conséquent, nos associations ont décidé de faire appel devant le Conseil d’État des décisions des tribunaux administratifs de Nice et de Marseille sur leur demande principale, à savoir la fermeture des locaux privatifs de liberté à la PAF de Menton et de Montgenèvre. Nos associations ont, de plus, ouvert une troisième voie au juge des référés du Conseil d’État en lui proposant, à défaut de fermer les locaux, de veiller à ce que les droits fondamentaux des personnes y soient respectés.

L’audience au Conseil d’État s’est tenue le 12 avril 2021.

Vous avez dit « mise à l’abri » ?

La réalité des personnes étant passées par ces locaux et ayant témoigné auprès de nos associations de ce qu’elles ont subi apparaît clairement très éloignée de ce que supposerait l’idée d’un « abri ».

Le 14 avril 2021, Amadou*, ressortissant guinéen, témoignait avoir été privé de liberté dans les constructions modulaires attenantes aux locaux de la PAF de Menton de 19h30 le 11 avril à 12h le 12 avril 2021. Dès son interpellation, il a déclaré sa minorité aux forces de l’ordre. Pourtant, cela n’a pas été pris en compte et il a été privé de liberté avec 20 autres personnes, uniquement des hommes adultes. Il a témoigné avoir reçu une bouteille d’eau et uniquement des sardines en boîte en guise de repas. Il a affirmé avoir eu froid pendant la nuit sans avoir reçu de couverture. Des cartons auraient été donnés par les policiers pour couvrir le sol selon son témoignage. Finalement, il a témoigné avoir dormi par terre, comme les autres personnes enfermées avec lui, sur un sol qui était sale.

Le 13 avril 2021, deux familles de ressortissants afghans ont témoigné avoir été privées de liberté toute la nuit du 12 au 13 avril dans la construction modulaire attenante aux locaux de la PAF de Montgenèvre. Pendant près de 12 heures, les membres de ces familles ont été enfermés dans ce local où près de 20 personnes étaient privées de liberté en même temps, créant une situation de forte promiscuité.

Le 8 octobre 2020, Maya*, ressortissante ivoirienne, témoignait de sa privation de liberté de plus de 14h avec ses deux enfants âgés de 3 et 5 ans au niveau du poste de la PAF de Menton. Privée de liberté avec plus de 17 autres personnes, hommes et femmes confondus, dans un petit espace, sans aucun respect des normes de protection sanitaire possible, elle n’a, de plus, reçu aucune nourriture et a témoigné de l’état déplorable des sanitaires.

En 2019, Alpha*, ressortissant nigérian âgé de 17 ans, témoignait avoir été enfermé dans la nuit du 27 au 28 mai 2019 dans les constructions modulaires attenantes à la PAF de Menton, pendant plus de dix heures. Une dizaine d’adultes étaient enfermés en même temps que lui, dans des conditions exécrables avec des toilettes inutilisables. Il aurait pourtant déclaré sa minorité et exprimé son souhait de demander l’asile en France, sans que cela ne soit pris en compte par les forces de l’ordre.

En 2018, Omar*, ressortissant ivoirien, âgé de 20 ans, témoignait de sa privation de liberté dans les locaux de la PAF de Montgenèvre de 18h à 7h du matin, dans la nuit du 3 au 4 septembre, sans nourriture ni eau.

Ce ne sont que quelques exemples parmi des centaines…

Pour suivre la campagne contentieuse : #DetentionArbitraire

*Afin de veiller à la confidentialité et l’anonymat des personnes, les prénoms ont été modifiés.

Associations signataires :
Anafé – Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers
Médecins du Monde
Organisations membres de l’Observatoire de l’enfermement des étrangers : ACAT-France, Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), Anafé, Comede, Droits d’urgence, Fasti, Genepi, Gisti, La Cimade, Le Paria, Ligue des droits de l’homme, MRAP, Observatoire Citoyen du CRA de Palaiseau, Observatoire du CRA de Oissel, Syndicat des avocats de France (SAF), Syndicat de la magistrature (SM)
Alliance-DEDF (Alliance des avocats et praticiens du droit des étrangers pour la défense des droits fondamentaux)
Roya citoyenne
Tous Migrants

Associations co-signataires :
AdN (Association pour la démocratie à Nice)
ASGI
CCFD-Terre Solidaire
Emmaüs Roya
Kesha Niya Kitchen
We world

Culture en danger.

OCCUPATION DU THÉÂTRE NATIONAL DE NICE
Nice, lundi 15 mars 2021
Nous, intermittent.e.s, de l’emploi, du spectacle, artistes, technicien.ne.s, agents territoriaux de la culture, étudiant.e.s, chômeurs et chômeuses, occupons depuis ce lundi 15 Mars 2021 le Théâtre National de Nice. Nous nous inscrivons dans la continuité des occupations de théâtres et de salles de spectacle partout en France insufflées par celle du Théâtre de l’Odéon à Paris le 4 Mars 2021.
Depuis un an, la crise sanitaire a laissé des pans entiers de notre société basculer dans une urgence sociale à laquelle les pouvoirs publics n’ont pas souhaité répondre. Nous sommes loin des promesses d’Emmanuel Macron qui disait qu’il ne laisserait personne au bord de la route.
Les étudiant.e.s laissé.e.s à leur détresse économique et à leur isolement social, le monde de la culture désigné comme non essentiel et qui n’a toujours pas été déconfiné, les deux millions d’intermittent.e.s de l’emploi (CDDU), saisonniers et saisonnières, maîtres d’hôtel, guides-conférencier.e.s… ont été condamné.e.s à une mort sociale par le gouvernement. Les emplois permanents sont fragilisés dans les structures culturelles entraînant la dégradation des conditions de travail des salarié.e.s et des agents publics. La mission de service public de la culture est de moins en moins assurée.
Cynique, le gouvernement a l’indécence de ressortir sa réforme de l’assurance chômage qui fragilise encore les plus précaires en leur promettant ainsi qu’aux autres privé.e.s d’emploi de baisser drastiquement leurs indemnités chômage.
C’est pourquoi nous exigeons :
– Le retrait pur et simple de la réforme d’assurance chômage et l’ouverture de la protection sociale à toutes et tous.
– La prolongation de l’année blanche, son élargissement à tous les travailleurs et travailleuses précaires, intermittent.e.s de l’emploi. Une baisse du seuil d’heures minimum d’accès à l’allocation chômage pour les primo-entrant.e.s ou intermittent.e.s en rupture de droits.
– Des mesures d’urgence pour garantir l’accès aux indemnités journalières de congés maternité, paternité et maladie, à toutes les travailleuses et travailleurs à l’emploi discontinu, autrices, auteurs et indépendant.e.s.
– Le maintien des emplois permanents dans les structures culturelles.
– La création d’une filière spectacle vivant dans la fonction publique.
– Des mesures d’urgence pour les jeunes et les étudiant.e.s face à la précarité financière et psychologique. Un plan d’accompagnement d’accès à l’emploi.
– L’abrogation de l’arrêté préfectoral interdisant la pratique du spectacle vivant dans les espaces publics.
– Des états généraux pour accompagner la réouverture des lieux : pas de réouverture sans droits sociaux.
Des agoras sont ouvertes  à toutes et à tous sur le parvis du TNN.

https://www.facebook.com/groups/cipcotedazur

Trois rendez-vous

Mardi 20 avril: L’agora de 14 heures sur le parvis du TNN  portera sur la  destruction annoncée du Théâtre   . Muriel Myette -Holtz  la directrice du TNN a été invitée à y participer.

Vendredi 23 avril: Place Massena
Bourdon  un bourdon de la colère. L’idée, c’est de partir d’une note commune, puis cuivres s’ajouteront, les percussions… jusqu’à former un cri de la colère »

Samedi 1er mai:
Le défilé du 1er mai partira du théâtre de Verdure à 14 heures, pour se diriger vers le quai des États-Unis, Rauba Capeu, le Port, Garibaldi, puis retour au TNN.
Un flashmob est en préparation pour le 1er mai, une centaine de personnes sont recherchées. Ceux qui veulent y participer peuvent se renseigner auprès des occupants du théâtre, sur le parvis du TNN.

Faisons vivre la Commune – Appel pour le 150ème anniversaire de la Commune de Paris.

Si l’AdN fait appel à vous pour diverses initiatives afin de célébrer l’esprit de la Commune (http://ademonice06.com/vivons-la-commune/), cela s’inscrit dans un festival plus large « Vive la Commune ! » qui fédère de multiples mouvements et associations de Nice qui vous proposerons de nombreuses initiatives du 18 mars au 28 mai 2021. En voici l’appel :

Dans la perspective du 150ème anniversaire de la commune de Paris et de Province, nous nous proposons d’organiser un festival du 18 mars au 28 mai 2021 à destination d’un large public, qui sera dédié à une importante palette de rencontres, débats, animations culturelles et actions de rue.
Afin d’éviter toute espèce d’ambiguïté sur le sens de cette initiative, les soussigné.e.s se revendiquent défenseurs du souvenir de La Commune comme expérience et moment unique d’émancipation sociale et politique, notamment par l’affirmation du rôle des femmes et la dimension internationaliste de cet épisode révolutionnaire.
Il s’agira d’essayer de s’inscrire dans la temporalité de la commune, tout en laissant une large place aux luttes solidaires actuelles et aux expériences d’auto-organisation qui se sont multipliées de par le monde depuis la fin du siècle dernier.
Nous essaierons, dans la mesure du possible, d’irriguer tous les quartiers.
L’idée de ce festival est de proposer selon les goûts, aspirations et possibilités de chacun et chacune des actions, rencontres, etc.
Nous appelons donc les associations ou individus désirant participer activement à ce festival à nous rejoindre, tout en nous proposant l’initiative qu’il ou elle souhaiterait conduire.
Chaque action n’engage pas tout le monde et l’objectif de ce collectif est de mettre en valeur les événements proposés par chaque organisation, personne, association, syndicat.
La commune n’est pas morte ! Vive la Commune !